"Quand-même" : drôle de devise pour une femme à la Belle Epoque !
Sarah Bernhardt l'adopte très tôt, lorsqu'elle comprend qu'il lui incombe, à elle seule, de prendre les rênes de sa vie et de façonner l'image qu'elle veut donner d'elle-même.
Jeune fille, Sarah souffre beaucoup du rejet, de la solitude, mais forge ainsi son caractère.
Jeune femme, sa mère (une courtisane en vue) organise son mariage : c'est la seule manière d'éviter à sa fille de suivre son chemin. Sarah refuse catégoriquement, et suit les conseils de l'un des "protecteurs" de la famille (le demi-frère de l'Empereur en personne !) : elle entre au Conservatoire.
Ce choix (car c'en est un), n'est pas anodin : Sarah veut travailler pour s'émanciper, et sait bien qu'à l'époque, les femmes qui brillent sont passées par les planches, ou par le lit des messieurs fortunés.
Elle fera les deux, et voilà que sa carrière s'envole.
Mais Sarah est aussi réellement talentueuse : elle révolutionne le jeu d'actrice de multiples manières. Victor Hugo l'appelle la "Voix d'Or", Edmond Rostand "La Reine de l'attitude et la Princesse des gestes", et Jean Cocteau, plus tard, "Le Monstre sacré" !
Pourtant Sarah ne répond pas aux codes de l'époque, et on lui fait comprendre à grand renfort de caricatures publiées dans la presse.
On la surnomme "le salsifi" en raison de sa maigreur. Elle s'en sert, et révolutionne la mode en se débarrassant du corset et de la crinoline.
On fustige ses mœurs légères : elle n'hésite pas à s'emparer de son image de courtisane et pose en Marie-Madeleine.
On s'attaque à ses orientations sexuelles : elle arbore fièrement un chapeau orné d'une chauve-souris, emblème des amours homosexuels.
On lui donne des rôles ne la mettant pas assez en valeur : elle publie par voie de presse sa démission de la prestigieuse maison de Molière, la Comédie française.
On critique son inconstance (l'actrice brille sur les planches mais expose aussi ses sculptures au Salon officiel, où elle est médaillée) : elle proclame que seule la voie artistique permet alors aux femmes une indépendance et un statut que le mariage leur refuse.
On s'en prend à ses origines juives : elle soutient Emile Zola au moment où il publie "J'accuse".
Vous l'aurez compris : talent, clairvoyance et tempérament ont fait de Sarah Bernhardt une femme hors du commun.
Et c'est ce destin extraordinaire que la conférence retrace, depuis ses plus beaux rôles au théâtre à ses apparitions sur grand écran, de ses tournées mondiales où elle triomphe à ses moments de répit qu'elle passe à Belle-Ile-en-mer, de la star peinte et surexposée à la sculptrice novatrice, de ses engagements politiques constants à ses excentricités (pour animaux de compagnie, un alligator et des lionceaux, et pour lit, un cercueil).