Dans un premier temps, Haydn compose l'œuvre pour un effectif orchestral. Les paroles de Jésus, en latin, sont inscrites en exergue des sept mouvements lents. Ces derniers sont tous de forme sonate, et forment un ensemble contrasté grâce à la variété des motifs, des rythmes et des tonalités. L'œuvre est complétée par une introduction et une conclusion d'une grande force, évoquant un terrible tremblement de terre et libérant toute la tension accumulée précédemment. Haydn adapte rapidement les Sept Paroles au quatuor à cordes. Dans sa forme initiale, l’œuvre est donc purement instrumentale. En 1792, Joseph Friebert, chanoine et maître de chapelle de la cathédrale de Passau, rédige un livret en langue allemande, et fait entendre une version chorale des Sept Paroles. Assistant à une représentation de son œuvre ainsi remaniée, Haydn ne la désapprouve pas et remet son ouvrage sur le métier en 1795 dans le but de remanier les parties vocales. Pour améliorer le texte de Friebert, il se fait aider par le baron van Swieten, un aristocrate hollandais alors installé à Vienne en tant que préfet de la bibliothèque impériale. Le baron collectionne les œuvres des compositeurs baroques, particulièrement celles de Johann Sebastian Bach et Georg Friedrich Händel, et ouvre volontiers les portes de la bibliothèque à Haydn, comme il le fait pour Mozart, plus tard pour Beethoven.

 

Ainsi, les “Sept dernières paroles du Christ en croix” résultent d’un travail collectif et d’un processus d’adaptations successives. Déjà à l’époque baroque, la transcription était un procédé répandu ; à l’opposé du principe du droit d’auteur aujourd’hui en vigueur, c’était même une forme d’hommage lorsqu’un compositeur s’appropriait l’œuvre d’un confrère pour la faire sienne. À l’époque classique et romantique, cette coutume permettait aux œuvres d’exister dans le cadre privé, un peu à la façon des enregistrements discographiques d’aujourd’hui.

 

Dans le prolongement du processus créatif des Sept Paroles, la Chapelle Rhénane et le Quatuor 1781 ont souhaité proposer une version inédite pour quatuor à cordes et quatuor vocal. Cette nouvelle adaptation a nécessité quelques aménagements dans les parties vocales, pour les passages où les voix solistes se superposent brièvement aux parties chorales, ainsi que la transcription de la seconde introduction pour quatuor à cordes en lieu et place d’un ensemble d’instruments à vent. Elle a engendré un travail de re-création que les huit musiciens impliqués ont mené avec beaucoup d’enthousiasme, le souci du détail, et avant tout le désir de laisser émerger conjointement l’intensité et l’universalité du message émotionnel d’une part, et la transparence de l’écriture musicale d’autre part.